Nantes, une ville transformée par l’art

Depuis qu’elle a reconverti ses anciens chantiers navals en sites culturels, Nantes vogue dans le sens du vent. Art contemporain en plein air, architecture du XXIe siècle et tendance écolo… Nantes est l’escale idéale pour un grand week-end d’évasion. 

C’est la faute à Jacques. Jacques Demy. Petit Nantais rêveur qui, devenu grand, réalisa des films chantés et enchanteurs, souvent tournés à Nantes, toujours traversés de dockers, de marins en béret à pompon et d’effluves maritimes. On a donc cru que Nantes était un port ouvert sur la mer. Erreur : la ville occupe un fond d’estuaire où se précipite la Loire et qui ne trouve son débouché sur l’Atlantique que 50 km plus loin. Mais rassurez-vous : tout Nantes sent la mer, les bateaux, les voyages au long cours… Seulement voilà̀, depuis la fermeture en 1987 de ses chantiers navals, Nantes se réinvente à sa façon. Elle a failli sombrer et si elle refait surface, c’est grâce à une créativité peu commune. Un passé à double visage On peut la visiter à rebrousse-poil, en commençant par le passé et ces quartiers historiques qui ont modelé une ville cossue. Nantes a été la triste championne des villes françaises participant au « commerce triangulaire » avec la traite négrière. Au cours du XVIIIe siècle, les navires affrétés depuis Nantes ont embarqué 450 000 esclaves noirs, soit 42% de la traite française ! Quand on se balade sur l’Ile Feydeau, rattachée à la partie nord de la ville depuis que le bras supérieur de la Loire a été comblé au début du XXe siècle, on longe l’imperturbable alignement d’hôtels particuliers à balcons en fer forgé et mascarons de pierre dont on sait qu’ils ont été construits grâce à la fortune douteuse des armateurs. Aujourd’hui, les Nantais regardent leur passé en face ; inauguré en 2012, le Mémorial de l’abolition de l’esclavage est constitué d’une esplanade végétalisée avec 2000 plaques commé-moratives pour rappeler les expéditions négrières. Crânement ancrée quai de Loire, à l’endroit même où accostaient les bateaux de la honte. Le majestueux château des Ducs de Bretagne, dont les douves sentent la pelouse taillée au millimètre et les massifs bien soignés, abrite un musée où la reconstitution d’une soute de bateau esclavagiste raconte l’indicible mieux que personne. Ce musée retrace l’histoire de la ville dans une scénographie interactive : ne ratez ni le film dédié à Anne de Bretagne, ni les cartes géographiques sur tables tactiles ni la formidable fresque finale signée Pierrick Sorin. Puis remontez vers le quartier Bouffay dont les ruelles pavées redéfinissent le cœur d’une ville bourgeoise. Au-delà du Cours des 50 Otages, on partira à l’assaut, liste en main, de tous ces lieux auxquels on réduisait Nantes, mille excuses !, jusqu’à ce que l’on y posât le pied : le théâtre Graslin, la rue Crébillon, périmètre chic où l’on fait de coquettes emplettes, la brasserie « La Cigale » au décor Art nouveau aussi gourmand que le contenu de ses assiettes et le fameux passage Pommeraye. Là, on s’incline : il éclipse jusqu’à la poésie des passages couverts parisiens, avec ses arcades ornées de stuc et son bel escalier intérieur qui pallie le dénivelé de la colline.